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Will WITTERS
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Le biais cognitif d'un ancien colonialisme dénié/oublié

Réflexions sur le colonialisme : un passé oublié et ses répercussions dans les médias actuels

En France, le cinéma a souvent été le miroir de nos histoires, de nos douleurs et de nos luttes. Pourtant, il y a un chapitre de l'histoire nationale qui reste largement inexploré dans le septième art : notre passé colonial. Alors que la décolonisation fait partie intégrante de l'histoire mondiale du XXe siècle, en France, la question coloniale, notamment celle de l’Algérie, a été reléguée dans les marges du débat public. Ce silence a des répercussions, non seulement sur notre mémoire collective, mais aussi sur le traitement médiatique des conflits contemporains, tels que celui entre Israël et la Palestine.

Un passé colonial occulté

Le 5 juillet 1962 marque la fin officielle de la guerre d'Algérie et l'indépendance de ce pays après plus de 130 ans de colonisation française. Ce fut un moment charnière, douloureux pour les deux nations, mais aussi pour les populations directement affectées, pieds-noirs, harkis, et Algériens. Malgré cette histoire commune, il est frappant de constater que le cinéma français a rarement abordé ce sujet avec la profondeur et la régularité qu'il mérite. Le passé colonial semble encore peser comme un tabou.

Ce silence est révélateur d'une difficulté plus large à faire face à ce passé. Contrairement à d'autres nations, comme l'Allemagne avec la Shoah ou les États-Unis avec l'esclavage, la France n'a pas pleinement intégré le débat sur son propre rôle en tant que puissance coloniale dans le cinéma et les médias. Ce manque de confrontation avec notre histoire fait écho à une forme de cécité sur les dynamiques coloniales encore présentes dans les conflits d'aujourd'hui.

Palestine-Israël : un prisme colonial méconnu

Le conflit israélo-palestinien est un sujet complexe, marqué par des décennies de violence, d'injustices et de souffrances des deux côtés. Mais dans le traitement médiatique de ce conflit en France, une tendance se dessine : l'oubli des dynamiques coloniales. Si le débat se polarise souvent entre soutien à l'un ou l'autre camp, il ne prend que rarement en compte les structures profondes de domination qui sont à l'œuvre, rappelant, parfois inconsciemment, les ressorts du colonialisme.

Le colonialisme ne se résume pas à l'occupation d'un territoire ; c'est aussi une idéologie qui justifie la domination d'un peuple par un autre, au nom d'une supériorité morale, culturelle ou économique. Dans ce prisme, les souffrances du peuple colonisé sont souvent minimisées ou ignorées, tandis que les colons, ou ceux en position de pouvoir, sont perçus comme ayant une légitimité naturelle à exercer leur autorité.

Le conflit israélo-palestinien, bien que complexe et unique en son genre, ne peut être déconnecté de cette histoire de domination. En France, les médias ont souvent du mal à aborder cette dimension coloniale du conflit, préférant se concentrer sur l'actualité immédiate, sans interroger les racines historiques de cette situation.

L'importance d'une approche impartiale et complète

Dans ce contexte, il est crucial de souligner l'importance d'une approche impartiale et complète, non seulement dans le traitement médiatique, mais aussi dans notre propre réflexion en tant que société. La France, avec son passé colonial, ne peut se permettre d'ignorer les dynamiques de domination qui se manifestent ailleurs. L'héritage colonial continue de hanter nos relations avec le monde, et ne pas en tenir compte revient à trahir une partie de notre histoire.

Cela implique également de ne pas oublier les victimes, de chaque côté du conflit. Dans toute guerre, il y a des souffrances, des pertes, et il est de notre responsabilité de ne pas prendre parti aveuglément, mais de comprendre la profondeur des blessures de chaque peuple. En ce sens, le cinéma, en tant qu'art majeur, a un rôle à jouer. Il peut être un vecteur de réconciliation, un outil pour explorer les non-dits et les zones d'ombre de notre histoire commune.

Vers une nouvelle écriture du cinéma et des médias

Le cinéma français a la capacité de revisiter ces questions. En explorant la mémoire de notre passé colonial, il peut également jeter une lumière nouvelle sur les conflits actuels. Plutôt que de les traiter uniquement sous l’angle du présent, il pourrait mettre en perspective les mécanismes historiques qui continuent d’influencer les rapports de force aujourd'hui.

Le cinéma, ainsi que les médias, a besoin d'une écriture impartiale, capable d'intégrer le poids de l'histoire sans tomber dans des discours manichéens. En tant que Français, nous avons le devoir de ne pas exclure notre propre passé colonial des débats actuels. Une société mature est celle qui regarde son histoire en face, qui comprend comment ses erreurs et ses choix d’hier influencent les conflits d’aujourd'hui, et qui reconnaît les souffrances des victimes, qu’elles soient d’ici ou d’ailleurs.

Conclusion

Il est temps que le cinéma français, et plus largement les médias, se penchent sur ces questions avec sincérité et impartialité. En revisitant notre passé colonial et en l'intégrant dans nos réflexions sur les conflits actuels, nous pouvons éviter de reproduire les erreurs du passé. C'est à travers une compréhension plus complète de l'histoire que nous pourrons espérer un jour construire des ponts entre les peuples, qu'ils soient français, israéliens ou palestiniens, et redonner une place à ceux dont la voix a trop longtemps été ignorée.

Monday 10.07.24
Posted by will witters
 

Faire face aux narratifs nauséabonds

Le narratif de l'extrême droite face à la représentation cinématographique

La Haine, les violences policières et la droitisation de la société : Le cinéma comme miroir d'une fracture sociale

Le film "La Haine" de Mathieu Kassovitz, sorti en 1995, reste une œuvre cinématographique puissante sur les violences policières en France. Il dépeint la vie de trois jeunes hommes issus de banlieues populaires, tentant de naviguer dans un environnement social oppressif et conflictuel. À travers les personnages de Vinz, Saïd et Hubert, le film explore l’hostilité croissante entre la jeunesse des quartiers et les forces de l'ordre, avec pour toile de fond un racisme systémique et une stigmatisation des "étrangers". Près de 30 ans après sa sortie, "La Haine" demeure incroyablement actuelle, alors que la société française se droitise et que l’étranger devient de plus en plus un cheval de Troie narratif pour les idéologies d’extrême droite.

La Haine et les violences policières : Une réalité toujours présente

Dans "La Haine", les violences policières ne sont pas seulement un événement, elles sont une omniprésence dans la vie des jeunes de la cité. Le film commence avec une bavure policière qui laisse Abdel, un habitant de la banlieue, entre la vie et la mort. Ce fil narratif central montre comment la brutalité policière est non seulement fréquente, mais aussi le symptôme d'un climat social où la défiance mutuelle règne. Les jeunes, souvent issus de familles immigrées, vivent sous une pression constante, victimes de contrôles au faciès, de harcèlement et de violences physiques qui ne semblent jamais sanctionnées.

Ce tableau sombre ne concerne pas seulement le passé. Les émeutes qui ont éclaté en France après la mort de Nahel, un adolescent tué par la police en 2023, témoignent d’une résonance tragique avec "La Haine". Les mêmes maux subsistent : la méfiance à l’égard des autorités, la colère refoulée des quartiers populaires, et l’impression que les citoyens de certaines zones sont considérés comme des sous-citoyens. Le film de Kassovitz prend ainsi une dimension prophétique, car il expose un cycle de violence qui se perpétue à mesure que les forces de l’ordre sont militarisées et que les banlieues sont stigmatisées.

La droitisation de la société et la montée des idées d'extrême droite

Depuis les années 1990, on assiste à une droitisation progressive de la société française. Des thèmes autrefois relégués à la marge par des partis d’extrême droite, comme le contrôle de l’immigration ou la sécurité, sont devenus des points centraux du débat politique mainstream. Cette normalisation des idées radicales se traduit non seulement par des politiques de plus en plus répressives envers les populations immigrées et les jeunes des quartiers populaires, mais aussi par un discours public où l’étranger est perçu comme une menace pour l'identité nationale.

Dans "La Haine", la figure de l’étranger est omniprésente, que ce soit à travers Saïd, d'origine maghrébine, ou Hubert, d'origine africaine. Ils incarnent cette jeunesse multiculturelle qui, loin d’être vue comme une richesse, est perçue comme un problème à gérer. Le film montre comment les habitants des banlieues sont exclus non seulement physiquement des centres-villes, mais aussi symboliquement du "nous" national. Cette exclusion se manifeste par la violence institutionnelle, mais aussi par un regard méprisant qui renforce l'idée que ces jeunes sont "autres", des étrangers dans leur propre pays.

La stigmatisation de l'étranger : Le cheval de Troie de l'extrême droite

L’étranger – qu'il soit immigré, fils d’immigré ou simplement perçu comme "différent" en raison de sa couleur de peau ou de son origine – est devenu un cheval de Troie narratif pour les idées d'extrême droite. Ce processus consiste à créer une figure de l'altérité, souvent associée aux dangers de la criminalité ou de l'insécurité, pour justifier des politiques de plus en plus dures.

Dans "La Haine", cette stigmatisation est symbolisée par les confrontations entre les jeunes de banlieue et la police, mais aussi par les regards et les commentaires des habitants des quartiers plus aisés. Les protagonistes, notamment Saïd et Hubert, sont toujours considérés comme des "autres", des corps étrangers dans un espace qui leur est hostile. Cette narration, qui oppose le "nous" (les Français) à "eux" (les étrangers ou descendants d’immigrés), sert de support aux idéologies qui prônent la fermeture des frontières, le repli sur soi et la militarisation des forces de l’ordre.

Le cinéma comme outil de résistance ou de perpétuation ?

Le cinéma, de par son pouvoir d’influence, peut soit résister aux narrations stigmatisantes, soit les perpétuer. Des films comme "La Haine" et "Les Misérables" s'efforcent de dénoncer les injustices systémiques, en donnant la parole aux populations marginalisées. En montrant la réalité des violences policières, ils soulignent la fracture sociale et le besoin urgent de justice sociale.

Cependant, d’autres films peuvent involontairement renforcer les préjugés et les stéréotypes sur les étrangers et les jeunes de banlieue. En représentant ces populations uniquement à travers le prisme de la violence ou de la délinquance, le cinéma participe à la construction d’un imaginaire collectif où l'étranger est constamment perçu comme un danger. Ce type de récits, combiné à la droitisation de la société, prépare le terrain pour des idéologies qui prônent l’exclusion, la répression et la fermeture.

Conclusion : Le cinéma face à la montée des tensions sociales

Dans un contexte où les violences policières continuent de fracturer la société et où les discours d’extrême droite gagnent en légitimité, le cinéma joue un rôle crucial. Des films comme "La Haine" permettent de comprendre les mécanismes d’oppression qui pèsent sur les populations marginalisées et d’ouvrir des débats sur l'avenir des relations entre l'État et ses citoyens. Cependant, il est impératif que le cinéma, en tant qu’art, ne tombe pas dans le piège du sensationnalisme ou de la simplification. Il doit continuer à proposer des récits nuancés qui remettent en question les dynamiques de pouvoir et qui reconnaissent la complexité des expériences humaines. Dans un monde où l'étranger est de plus en plus utilisé comme un outil narratif pour justifier des politiques sécuritaires, le cinéma peut être une forme de résistance – ou de complicité silencieuse.

Tuesday 09.24.24
Posted by will witters
 

Écrire sur le viol. L'épineuse traversée d'un désert sanglant.

Contre vents et marrée. Le patriarcat, mais pas que…

Écrire nos personnages dans leurs tentatives de sortie de leur état de sidération, et vous positionnez en tant que narrateur dans une poste omnisciente. Ce qui vous permettra de traiter le sujet plus profondément.

Le patriarcat au cinéma : Comment les plaintes de viol sont retournées contre les victimes à l’écran et dans la réalité

Dans le cinéma comme dans la vie réelle, le viol est un crime trop souvent relégué à la marge, minimisé ou même inversé en un acte où la victime devient accusée. Le patriarcat, système de domination masculine, joue un rôle majeur dans l’étouffement des voix des victimes de violences sexuelles, et cela se reflète largement à l’écran. Le septième art, en tant que miroir de nos sociétés, participe tantôt à renforcer ces stéréotypes, tantôt à les déconstruire. L’analyse de ce phénomène est cruciale, car le cinéma, puissant vecteur d'idées, contribue à façonner les mentalités autour du viol, du consentement et de la culpabilité.

Le retournement de l'accusation dans les films : Une dynamique récurrente

Le cinéma est un outil narratif puissant pour exposer les réalités sociales, mais il peut aussi reproduire les mécanismes d’oppression du patriarcat. L'un des moyens les plus insidieux par lesquels les victimes de viol sont réduites au silence, à la fois dans les films et dans la réalité, est le retournement de l’accusation. Ce processus se manifeste à plusieurs niveaux :

  1. Culpabiliser la victime : Dans de nombreux films, la victime de viol se voit immédiatement confrontée à des questions sur son comportement : "Pourquoi était-elle habillée ainsi ?", "Pourquoi était-elle seule la nuit ?" Ces questions banales, mais destructrices, nourrissent l’idée que la victime est partiellement responsable de ce qui lui est arrivé. Cette dynamique est par exemple visible dans le film The Accused (1988), où le personnage de Sarah Tobias (Jodie Foster) est jugée aussi sévèrement que ses agresseurs en raison de son attitude jugée provocante.

  2. Légitimer le doute sur la parole des victimes : Dans des films comme Gone Girl (2014), la manipulation des accusations de viol ou d’agression sexuelle devient un ressort narratif central. Amy, le personnage principal, met en scène de fausses accusations pour piéger son mari, renforçant ainsi l'idée que les femmes peuvent mentir sur les violences sexuelles pour se venger ou obtenir ce qu'elles veulent. Bien que ce film soit une fiction, ce type de représentation peut renforcer l'idée que les accusations de viol sont souvent exagérées ou fabriquées, ce qui perpétue le doute systématique autour de la parole des victimes dans la réalité.

  3. Minimiser l'agression : Le cinéma mainstream, en particulier dans les comédies, a longtemps banalisé des comportements sexuels violents. Des scènes où le consentement est flou, voire absent, sont souvent traitées comme des malentendus plutôt que comme des agressions. Ce traitement légitime l’idée que certains viols ne sont "pas si graves". Des films comme American Pie (1999) ou Animal House (1978) tournent en dérision des situations où les femmes sont filmées à leur insu ou abusées en étant ivres, reléguant l'agression au statut de blague potache plutôt qu'à celui de crime.

  4. Inverser les rôles de victime et d’agresseur : Un autre procédé commun dans les films consiste à peindre l’agresseur en victime, surtout lorsqu’il est un personnage charismatique ou influent. Dans Le Talentueux Mr. Ripley (1999), par exemple, la trame pousse presque à excuser les crimes de Tom Ripley, en tant que personnage perturbé, marginalisé et vulnérable, malgré ses actes de manipulation et de violence. Ce glissement narratif reflète une réalité où les agresseurs (souvent des hommes puissants) se présentent eux-mêmes comme les véritables victimes des accusations.

Le patriarcat à l’écran : un système qui étouffe la vérité

L’industrie du cinéma a été, et reste encore souvent, dominée par une perspective masculine. Dans ce contexte, la manière dont les histoires de viol et de violence sexuelle sont racontées à l’écran est profondément influencée par le patriarcat, qui tend à minimiser les violences subies par les femmes tout en protégeant les agresseurs.

1. Invisibilisation des violences sexuelles

Le viol a souvent été dépeint dans les films comme un ressort narratif secondaire ou utilisé pour ajouter du drame dans les arcs des personnages féminins. Mais rarement ces récits se concentrent-ils sur les réalités du traumatisme vécu par la victime. Cette approche reflète un mécanisme patriarcal : rendre invisible la douleur des victimes pour éviter de confronter le public à la brutalité des violences sexuelles.

Des films comme Elle (2016), bien que traitant du viol, continuent de présenter des récits où la complexité psychologique des personnages peut flirter avec des représentations ambivalentes du consentement et du pouvoir. Dans ce film, le viol du personnage principal, Michèle (interprétée par Isabelle Huppert), n’est pas seulement minimisé, mais s’inscrit dans une relation complexe où la frontière entre désir et agression est délibérément brouillée, renforçant une ambiguïté qui déresponsabilise partiellement l’agresseur.

2. Protection des agresseurs puissants

Des films et des séries centrés sur des figures puissantes, charismatiques et masculines mettent souvent en scène des agresseurs bénéficiant de la protection de leur statut. Un exemple emblématique est le film Sleepers (1996), où le viol de jeunes garçons dans un centre de détention est occulté pendant des années en raison du pouvoir de leurs agresseurs. Le système judiciaire et la société ferment les yeux sur ces crimes, et les victimes finissent souvent par être perçues comme des sources de désordre social lorsqu'elles décident de briser le silence.

Dans la réalité, ce mécanisme de protection s'est reflété de manière spectaculaire lors du scandale Harvey Weinstein, où un magnat d’Hollywood a pu pendant des décennies abuser de son pouvoir pour harceler et violer des femmes sans jamais être inquiété. De nombreuses victimes ont vu leurs carrières brisées après avoir osé le dénoncer, tandis que Weinstein a continué à prospérer, protégé par le silence complice de l’industrie.

Les conséquences pour les victimes à l'écran et dans la réalité

Le retournement de l'accusation de viol, qu’il soit représenté dans les films ou observé dans la réalité, a des conséquences graves pour les victimes :

  1. La revictimisation : Le cinéma, en reflétant la réalité patriarcale, contribue parfois à renforcer la honte et la culpabilité ressenties par les victimes. Elles sont non seulement traumatisées par l'agression, mais aussi par la manière dont elles sont traitées par la société ou les institutions. Des films comme The Nightingale (2018), bien que violents et dérangeants, cherchent à déconstruire cette dynamique en exposant le chemin de douleur que les survivantes doivent parcourir.

  2. Le silence forcé : Tout comme dans la réalité, la représentation du viol au cinéma peut dissuader les victimes de parler. Si le cinéma montre que la parole des victimes est systématiquement rejetée, minimisée ou discréditée, cela peut renforcer l’idée que dénoncer est inutile, voire dangereux. Cette dynamique a été brisée en partie par des récits plus récents, comme Promising Young Woman (2020), qui interroge la manière dont la société échoue à soutenir les victimes et à rendre justice.

Le cinéma peut-il briser le cycle ?

Si l'industrie du cinéma a longtemps contribué à la banalisation du viol et à la protection des agresseurs, elle peut aussi être un vecteur de changement. Des films et des documentaires récents tentent de renverser ces dynamiques en racontant des histoires qui placent la parole des victimes au centre et dénoncent le patriarcat systémique.

Des films comme Spotlight (2015), qui expose les abus sexuels au sein de l'Église catholique, ou Bombshell (2019), qui traite des accusations de harcèlement sexuel à Fox News, mettent en lumière la manière dont les puissants agresseurs peuvent être confrontés, et l’importance cruciale de croire les victimes.

Conclusion : Le cinéma comme outil de transformation sociale

Le patriarcat, qui cherche à retourner les plaintes de viol contre les victimes, trouve un écho puissant dans le cinéma. Mais le cinéma, avec son pouvoir de toucher les consciences et d’ouvrir des débats, peut aussi être l'un des instruments pour changer cette dynamique. En racontant des histoires honnêtes et empathiques sur les violences sexuelles et en donnant la voix aux survivantes, l'industrie cinématographique peut contribuer à briser le cycle du silence et de la culpabilisation.

Des récits plus inclusifs, où la parole des victimes est centrale et où la culture du viol est remise en question, peuvent transformer non seulement la manière dont le viol est perçu dans les films, mais aussi dans la société.

NB : La minorité oubliée à l’intérieur de la minorité – Les hommes victimes de viol par des femmes

Bien que les débats sur le viol et les violences sexuelles se concentrent principalement sur les femmes victimes d’agressions, il est important de rappeler qu’environ 10 % des viols sont commis par des femmes, souvent sur des hommes. Ces victimes constituent une minorité invisible au sein d'un sujet déjà stigmatisé. En raison de cette minorité, leurs voix sont souvent exclues du débat public, renforçant ainsi leur sentiment de honte et d'isolement.

Si on veut traiter un sujet dans son ensemble, cela doit être pris en compte quelque part dans le narratif. C’est ce que réussis très bien Nolwen dans le film Polisse en incluant aussi une scène où une mère est confrontée aux policiers suite attouchements sur son nouveau né - pour faire passé ses crises.

Ces hommes sont une minorité au sein de la minorité. Leur exclusion du discours sur les violences sexuelles reflète une norme patriarcale qui ne reconnaît pas pleinement leur souffrance, renforçant des stéréotypes toxiques sur la masculinité et le consentement.

Il est donc essentiel de considérer toutes les victimes de violences sexuelles, quelle que soit leur identité de genre ou celle de leur agresseur. La diversité des expériences doit être intégrée dans les récits, afin de créer un espace de reconnaissance et de soutien pour toutes les personnes touchées.

NB2: Dans chaque sujet traité, il est important de regarder le miroir de ce qui est dénoncé. L’enfant dit “c’est celui qui dit qui est”, le scénariste doit regarder celui qui dit: “il y a exclusion” et regarder ainsi qui est exclu de la sorte par cette dénonciation.

Non pas que la dénonciation est calomnieuse, mais bien parce que dans les biais cognitifs, il y a une sorte d’habitude, on n’est pas omniscient lors de nos dénonciations. Lorsqu’on écrit, il est préférable d’avoir une écriture omnisciente, il est nécessaire que notre récit prennent en compte les choses oubliés par le narratif d’une seule personne.

Pour ce qui est du débat des viols dans les médias, le but n’est pas de compléter le discours d’une victime par une interview, Les médias sont en état de sidération vis à vis du sujet. Ils manquent cruellement d’empathie et d’omniscience, ce qui ne leur permet pas de résoudre l’insoluble question du malaise de société.

Ce qui par contre peut être résolut dans un film ou dans un livre, car vous aurez l’opportunité ici de traiter le sujet selon votre vision, en ajoutant le narratif habituel des antagonistes, et bien sûr, en prenant en compte la complexité de la chose via la notification, même minimale, de l’exclusion dans l’immense océan de tentative de reconnaissance.

Tuesday 09.24.24
Posted by will witters
 

Votre scénario sur le divan

Le personnage principal est un être humain

Psychologie et psychiatrie au service de la fiction : Comment les troubles façonnent l'évolution d'un personnage

La complexité des personnages est souvent ce qui fait la force d’une œuvre de fiction, que ce soit dans la littérature, le cinéma ou les séries télévisées. Un des moyens les plus puissants d’ajouter de la profondeur à un personnage est de lui attribuer des particularités psychologiques ou psychiatriques. Ces traits influencent non seulement leur comportement, mais également la manière dont ils évoluent tout au long de l’histoire. En s'appuyant sur des troubles mentaux réels ou des nuances psychologiques subtiles, les créateurs peuvent développer des récits riches et engageants.

Psychologie vs. psychiatrie : Quelles différences ?

Avant de plonger dans l’analyse narrative, il est utile de faire la distinction entre psychologie et psychiatrie :

  • La psychologie est l’étude des comportements, des émotions et des pensées. Elle se concentre sur les mécanismes cognitifs, émotionnels et sociaux qui influencent la manière dont une personne interagit avec le monde.

  • La psychiatrie, en revanche, est une branche de la médecine qui s'intéresse aux maladies mentales, aux troubles psychiques et aux dysfonctionnements neurologiques. Elle se penche sur les diagnostics et les traitements des troubles comme la schizophrénie, le trouble bipolaire ou encore la dépression sévère.

Ces deux approches peuvent être exploitées dans une œuvre de fiction pour façonner l’évolution des personnages, en leur conférant des traits ou des troubles spécifiques qui influenceront leur cheminement.

Les troubles psychologiques comme moteur narratif

Un personnage présentant des particularités psychologiques – qu’il s’agisse d’un trauma, d’un trouble anxieux ou de phobies – offre au récit un dynamisme tout particulier. Ces caractéristiques influencent la manière dont ce personnage perçoit le monde, réagit aux événements et interagit avec les autres. Elles servent souvent de moteurs narratifs, en initiant des conflits internes ou externes, en créant des obstacles et en enrichissant l’intrigue.

Prenons, par exemple, le personnage de Will Hunting dans Will Hunting (Good Will Hunting). Will est un jeune prodige autodidacte qui souffre de troubles de l'attachement et d'une peur profonde de l'abandon, résultat d’un passé marqué par des abus. Sa particularité psychologique est centrale à l’intrigue : bien qu’il possède un talent exceptionnel, ses traumatismes et ses défenses psychologiques l’empêchent d’accepter son potentiel et de développer des relations saines. Son évolution narrative se joue au fil de ses séances de thérapie, qui dévoilent peu à peu la source de ses comportements autodestructeurs. Le film nous montre qu’il n’est pas simplement une question de talent ou d’intelligence, mais de guérison et de dépassement de ses blessures émotionnelles.

Ce type de développement permet au spectateur de voir un personnage évoluer non seulement en fonction des événements extérieurs, mais aussi de sa propre psychologie interne.

Les troubles psychiatriques et la transformation d’un personnage

Dans d’autres récits, les personnages évoluent en fonction de troubles psychiatriques plus graves, comme des dépressions majeures, des psychoses ou des troubles de la personnalité. Ces personnages sont souvent aux prises avec des conditions qui dépassent leur propre contrôle, et leurs trajectoires narratives peuvent inclure des moments de crise, de guérison, ou de chute dramatique.

Prenons l'exemple du personnage de Nina Sayers dans Black Swan (2010). Nina est une danseuse de ballet perfectionniste, dont la quête obsessive de la perfection déclenche un processus de décompensation psychiatrique. Au fil du film, Nina sombre dans la schizophrénie et la paranoïa, se perdant dans des hallucinations qui brouillent la frontière entre réalité et illusion. La détérioration de son état mental devient un élément clé du drame du film, et son évolution (ou plutôt sa descente) est directement liée à son trouble psychiatrique.

Ici, le trouble mental de Nina n’est pas seulement un trait de caractère, mais un élément structurant de la narration, qui modifie la perception de l’audience et guide le déroulement de l’intrigue. La psychiatrie devient alors un levier puissant pour jouer sur l’ambiguïté et le suspense dans l’évolution du personnage.

L’évolution psychologique ou psychiatrique comme miroir du thème de l’œuvre

Dans de nombreuses œuvres, l’évolution psychologique d’un personnage est également un miroir des thèmes centraux de l’histoire. Que le récit traite du deuil, de la solitude, de l’identité ou de la rédemption, la manière dont un personnage évolue mentalement reflète souvent la portée émotionnelle plus large de l’œuvre.

Dans Joker (2019), par exemple, le personnage d’Arthur Fleck, incarné par Joaquin Phoenix, souffre de troubles mentaux exacerbés par l’indifférence et la cruauté de la société qui l’entoure. Sa chute dans la folie et sa transformation en Joker ne sont pas seulement un voyage personnel, mais également une critique sociale qui interroge la manière dont les individus vulnérables sont négligés et marginalisés. L’évolution psychiatrique d’Arthur devient ainsi une allégorie des tensions sociales qui parcourent l’histoire, et son destin tragique reflète le thème de la déshumanisation dans une société brutale.

L’impact sur la structure narrative

L’intégration de particularités psychologiques ou psychiatriques chez un personnage influence aussi la structure narrative. Ces traits peuvent conduire à des récits plus introspectifs, où les conflits internes occupent une place centrale, ou bien à des récits où les comportements imprévisibles des personnages créent des moments de tension et de suspense.

Dans Fight Club (1999), le personnage principal, souffrant de troubles dissociatifs de l'identité, est à la fois le protagoniste et l'antagoniste de son propre récit. L’évolution psychologique du personnage prend la forme d’un twist narratif majeur qui redéfinit l’intégralité de l’histoire. Ce type de structure devient possible grâce à l’exploitation de la pathologie psychiatrique comme élément clé du récit.

Conclusion : La psychologie comme outil d’évolution et de transformation

Les particularités psychologiques ou psychiatriques permettent aux auteurs et réalisateurs de développer des personnages riches et nuancés, dont l'évolution reflète autant des conflits internes que des enjeux externes. Que ces troubles servent à créer des obstacles ou à générer de la profondeur émotionnelle, ils contribuent souvent à enrichir la trame narrative en explorant les complexités de l’esprit humain.

Ainsi, les créateurs de fiction utilisent la psychologie et la psychiatrie non seulement pour façonner les caractères de leurs personnages, mais aussi pour ancrer leurs récits dans des dynamiques humaines universelles, tout en offrant au public une réflexion sur les subtilités de l'esprit et ses transformations.

Tuesday 09.24.24
Posted by will witters
 

Les dualités: utopies contre dystopies

Azimov contre Orwell

Intelligence Artificielle et Contrôle Total : Quand Asimov rencontre Orwell

L’intelligence artificielle (IA) fascine et inquiète à la fois. À travers la littérature, cette technologie a souvent été présentée sous deux prismes différents : celui de la régulation et de la moralité, comme dans les œuvres d’Isaac Asimov, et celui du contrôle et de la surveillance, représenté de manière oppressante dans 1984 de George Orwell. Ces deux visions, bien que fondamentalement différentes, posent des questions profondes sur les limites de l’IA, le pouvoir qu’elle pourrait acquérir et la place des humains dans un monde dominé par la technologie.

Les trois lois de la robotique d'Asimov : Une éthique intégrée à la machine

Isaac Asimov, dans son œuvre prolifique, a introduit un concept qui est devenu incontournable dans la réflexion autour de l’intelligence artificielle : les Trois Lois de la Robotique. Celles-ci sont des règles intégrées dans les machines afin de garantir que les robots et les IA se comportent d’une manière moralement acceptable. Les voici :

  1. Un robot ne peut porter atteinte à un être humain ni, par son inaction, permettre qu’un être humain soit exposé au danger.

  2. Un robot doit obéir aux ordres que lui donne un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la Première Loi.

  3. Un robot doit protéger son existence tant que cette protection n’entre pas en conflit avec la Première ou la Deuxième Loi.

Ces lois représentent une tentative d’intégrer une éthique de protection et de bienveillance au sein des machines. Dans le monde d’Asimov, l’IA est conçue pour servir les intérêts humains, garantissant ainsi que l’humain conserve le contrôle sur la technologie qu’il a créée. Cependant, cette utopie technologique repose sur une idée fondamentale : que les IA seront toujours programmées pour respecter ces lois et que les humains qui les conçoivent agiront toujours dans l’intérêt général.

1984 de George Orwell : Quand la technologie devient instrument de contrôle

En contraste frappant avec la vision d’Asimov, George Orwell dépeint dans 1984 une société où la technologie est au service d’un État totalitaire, utilisé pour surveiller, manipuler et contrôler les populations. Le "Big Brother" omniprésent utilise des dispositifs technologiques sophistiqués pour surveiller les citoyens à chaque instant, renforçant ainsi la soumission des individus au pouvoir central.

Dans ce récit, la technologie n'est plus un outil neutre ou un serviteur bienveillant. Elle devient une arme dans les mains d’un régime tyrannique pour maintenir l'ordre et éliminer toute forme de résistance. La surveillance, l’espionnage et la réécriture de l’histoire sont rendus possibles par des technologies avancées, qui contrôlent non seulement les actions, mais aussi les pensées des individus.

Là où les robots d’Asimov sont encadrés par des lois éthiques, la technologie dans 1984 ne connaît aucune limite morale. La différence fondamentale est que, chez Orwell, ce ne sont pas les machines qui posent problème, mais l’usage qu’en fait le pouvoir humain.

Asimov et Orwell : Deux visions opposées du contrôle technologique

En mettant en parallèle Asimov et Orwell, deux visions émergent : l'une où la technologie est un outil fondamentalement sous contrôle éthique, l’autre où elle devient une extension de l’oppression humaine.

Dans le cadre d’Asimov, les robots et les IA sont programmés pour protéger les humains, et les lois qu’ils suivent sont une sorte de garde-fou. Les craintes liées à l’IA reposent surtout sur des questions techniques — comme le dysfonctionnement des systèmes ou des erreurs de programmation. Les lois visent à éviter qu'une IA puisse un jour dominer l’homme ou agir contre lui, incarnant ainsi une vision optimiste où la technologie peut être régulée par des règles morales.

Orwell, de son côté, anticipe les risques non pas des IA elles-mêmes, mais de la façon dont elles sont utilisées par des pouvoirs politiques. 1984 décrit un monde où la technologie, plutôt que d’être neutre, devient l’instrument de la tyrannie. Le « Big Brother » de 1984 n’a pas besoin d’IA consciente pour opprimer : des caméras de surveillance, des microphones et des algorithmes basiques suffisent pour maintenir un contrôle total. Orwell souligne ainsi que le danger ne réside pas dans l’autonomie des machines, mais dans l’usage politique de la technologie pour asservir.

La convergence des deux mondes : Quand la surveillance rencontre l’IA

Aujourd'hui, le débat sur l’intelligence artificielle ne peut être isolé de la question du contrôle. Si les lois d’Asimov sont une utopie, le monde contemporain s’apparente davantage à une fusion des deux récits. L'IA moderne, dans des systèmes de surveillance massifs ou des algorithmes d'analyse comportementale, est souvent utilisée pour contrôler et prédire les actions humaines, que ce soit par des gouvernements autoritaires ou des entreprises privées.

Les technologies de reconnaissance faciale, l’analyse des données personnelles et la surveillance omniprésente rappellent inévitablement les préoccupations d’Orwell. Dans certaines régions du monde, la technologie est déjà utilisée pour surveiller la population en temps réel, ce qui pousse à la réflexion : qui contrôle l'IA, et avec quelles intentions ?

Pour autant, des chercheurs en IA et des régulateurs tentent de mettre en place des systèmes éthiques et des cadres législatifs pour s’assurer que l’IA reste un outil au service de l’humain, comme l'aurait imaginé Asimov. Mais la question demeure : ces lois éthiques pourront-elles vraiment contrer l’appétit de contrôle des États et des grandes entreprises ?

Conclusion : L’utopie et la dystopie à l'ère de l’IA

En fin de compte, les visions d'Asimov et d’Orwell se complètent et nous rappellent qu’une technologie, aussi avancée soit-elle, n'est jamais intrinsèquement bonne ou mauvaise. Tout dépend des lois, éthiques ou légales, qui encadrent son usage, et des mains dans lesquelles elle se trouve. Tandis qu’Asimov rêvait d’un monde où les machines protégeraient l'humanité, Orwell nous met en garde contre le jour où celles-ci seront utilisées pour la contrôler.

Le défi moderne est donc de s'assurer que la balance penche davantage vers une gouvernance éthique de l'intelligence artificielle, pour que l’utopie d’Asimov ne devienne pas la dystopie d’Orwell.

NB : Si votre récit intègre des concepts d'intelligence artificielle et de futurs dystopiques, il est essentiel de considérer la dualité qui en découle. Quel message souhaitez-vous transmettre ? Quelle est l’équilibre des forces ? Votre intrigue doit suivre une progression parallèle à l'évolution de votre propre réflexion, dévoilant peu à peu votre positionnement au fur et à mesure que votre écriture avance.

Tuesday 09.24.24
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Déterminisme vs détermination

ROCKY, le combat contre le déterminisme social.

Rocky et le déterminisme social : Quand la volonté défie les structures

Le cinéma a souvent été un espace où l'individu transcende son destin, défiant les lois de la société et les obstacles qui se dressent devant lui. Un des exemples les plus frappants de cette dynamique est sans doute le film Rocky, réalisé par John G. Avildsen en 1976. Le personnage de Rocky Balboa, incarné par Sylvester Stallone, se dresse comme un symbole de persévérance individuelle contre un monde qui semble vouloir l’écraser. Mais si l’histoire de Rocky résonne tant auprès du public, c’est qu’elle résonne aussi avec une question plus profonde : celle du déterminisme social.

Le déterminisme social selon Pierre Bourdieu

Pierre Bourdieu, sociologue français de renom, a profondément influencé la manière dont nous comprenons les structures sociales et les inégalités. L'une de ses théories centrales est celle du déterminisme social. Selon Bourdieu, la position sociale d'un individu est largement déterminée par son capital — qu'il soit économique, social, ou culturel — hérité de sa famille et de son environnement. Ces capitaux conditionnent les chances de réussite et les trajectoires de vie. En d'autres termes, pour Bourdieu, la société est structurée de telle manière que les classes sociales tendent à reproduire leur statut, et il est difficile, voire impossible, pour un individu d'échapper à sa condition de départ.

Ainsi, dans une vision bourdieusienne, le destin de quelqu’un comme Rocky Balboa, issu des classes populaires de Philadelphie, serait de rester coincé dans une vie d’échec et de médiocrité. Le personnage de Rocky travaille comme collecteur de dettes pour des usuriers et peine à survivre dans un milieu qui lui laisse peu de chances de s’épanouir. Tout, dans son parcours, semble confirmer le déterminisme social tel que l’analyse Bourdieu.

Rocky : une rébellion contre le destin social ?

Rocky, pourtant, n'est pas un film sur l'impossibilité de changer son sort, mais sur la capacité à le transcender. L’histoire de Rocky est celle d’un homme qui refuse d’accepter les limitations que son milieu social impose. Lorsqu’une opportunité inattendue se présente — un combat contre le champion du monde de boxe, Apollo Creed —, Rocky saisit cette chance comme un moyen de prouver à lui-même et au monde qu'il vaut plus que ce que la société lui a attribué.

Le film se présente donc comme une ode à la persévérance individuelle et à la volonté de surmonter les déterminismes sociaux. Rocky ne devient pas nécessairement riche ou prestigieux à la fin du film, mais il parvient à accomplir quelque chose de bien plus fondamental : il prouve qu’il est possible de se battre contre l’ordre social et, au moins dans une certaine mesure, de le défier.

Quand l'individu défie les structures : un mythe ?

Toutefois, il convient de ne pas oublier que Rocky reste une fiction, et que l'exception que représente le succès de Rocky ne contredit pas la règle théorique de Bourdieu. Le fait que Rocky parvienne à se hisser jusqu’à un combat pour le titre mondial est, en grande partie, le fruit d’une opportunité presque accidentelle — un "coup de chance". Cela rappelle que, bien que les individus puissent parfois défier le déterminisme social, de telles réussites sont souvent le fruit de circonstances rares et exceptionnelles, plutôt que d’un effort individuel seul.

D’ailleurs, si on analyse l'ensemble des films de la saga Rocky, on voit que Rocky doit constamment se battre contre le poids des structures sociales, économiques et culturelles qui cherchent à le remettre à sa place. Son succès initial ne lui assure pas une ascension sociale durable ; il doit continuellement lutter pour conserver ce qu’il a conquis, dans un monde où les structures sont implacables.

Conclusion : Rocky et Bourdieu, deux visions réconciliables ?

Alors, Rocky Balboa est-il un contre-exemple à la théorie du déterminisme social de Bourdieu ? Oui et non. Rocky nous montre qu’il est possible, à travers la force de la volonté, le travail et un concours de circonstances, de repousser les frontières imposées par le milieu social. Mais il ne faut pas oublier que ces récits sont rares, et qu’ils relèvent souvent d'une mythologie de la réussite individuelle qui ne s’applique pas à la majorité des personnes issues des classes populaires.

En fin de compte, Rocky nous rappelle que si l’individu peut, parfois, défier les lois de la société, la réalité quotidienne est souvent plus proche des structures sociales rigides décrites par Bourdieu. Il y a une tension permanente entre ces deux réalités : le désir d’échapper à sa condition, et la force invisible mais puissante des structures sociales qui nous ramènent à notre point de départ.

Tuesday 09.24.24
Posted by will witters
 

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